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RECONNAISSANCE AT/MP DANS LA FONCTION PUBLIQUE

Le conseil d’état s’est clairement positionné sur le fait que les dispositions du Code de la Sécurité Sociale ne sont pas applicables au fonctionnaires (CE 20/05/77 Ministre de l’éducation nationale/Coroller rec p 234 ; TC 28/02/1966 préfet de Gironde/Franco Rec P 827 AJDA 1967 P43 note Moreau).

I Reconnaissance de l’AT/MP des fonctionnaires

A – Absence de présomption d’imputabilité

On parle d’accident de service pour accident de travail cette notion incluant l’accident de trajet et de maladies professionnelles.

La présomption d’imputabilité de l’accident de service ou de la maladie professionnelle est plus atténuée en droit public qu’en droit privé :

–        Si l’accident survient au temps et au lieu du travail il sera reconnu comme imputable au service. La définition résulte de la circulaire FPA 1711 du 30 Janvier 1989 :

« De l’action violente et soudaine d’une cause extérieure provoquant au cours du travail ou du trajet une lésion au corps humain »

Il appartient quand même à l’agent de prouver par tous moyens la matérialité des faits et leur rapport avec le service

–        Pour les maladies l’imputabilité est automatique pour celles qui sont inscrites aux tableaux des maladies professionnelles  de la SS (cadre fixe)

–        Si la maladie ne figure pas au tableau elle peut néanmoins être reconnue comme contractée dans l’exercice des fonctions s’il est démontré qu’elle résulte d’une exposition prolongée à certaines conditions de travail (lien direct entre la maladie et les fonctions) – Déclaration dans un délai de six mois (cadre ouvert).

Précision concernant la sclerose en plaques : les recours indamnitaires sont formés au visa de l’article L 3119-9 du CSP (dommage imputable directement à une vaccination obligatoire par des agents hospitaliers qui estiment avoir subi cette maladie suite à la vaccination contre l’hépatite B).
La personne qui recherche la responsabilité de l’état sur le fondement de ces dispositions doit établir outre le caractère obligatoire de la vaccination, l’existence d’un lien de causalité et le dommage.
Précision relative à la dépression, le CE a eut l’occasion d’admettre que l’état dépressif d’un agent pouvait être imputable au service (Ministre de l’éducation nationale /ris 2/06/93), il en va de même du harcèlement .

B – Procédure de reconnaissance de l’AT/MP

 

La gestion de l’instruction de l’AT/MP est plus longue du fait de l’absence de centralisation et de présomption d’imputabilité, ce qui impose une instruction quoique le rattachement puisse être évident.

L’agent doit adresser sa déclaration d’accident de service à son employeur (en fait son supérieur hiérarchique) dans un délai de 24h, la prise en charge peut cependant intervenir durant un délai de deux ans.

Quand bien même  l’administration jugerait la déclaration d’accident frauduleuse, elle ne pourrait de sa propre autorité la rejeter, il lui appartiendrait de saisir la CRD (Article 16 du Décrêt 87-602 DU 30/07/87).

 

1 – Il appartient à l’AGENT de fournir :

– Une déclaration de maladie professionnelle précisant les circonstances de la maladie ou déclaration d’AT.

– Un certificat médical initial rédigé par un médecin

– Les arrêts de travail

– L’agent doit apporter la preuve de la matérialité des faits et la preuve du lien causal entre l’exposition professionnelle et l’affection

2 – Il appartient au(x) MEDECIN(S) de fournir :

– Le certificat médical initial

– La Médecine Professionnelle et Préventive (Le médecin du travail) doit fournir un rapport mettant en évidence les fonctions de l’agent qu’il doit rapprocher d’un tableau de maladies professionnelles

L’agent est placé en congé pour accident de service jusqu’à ce qu’il soit capable de reprendre son service ou jusqu’à la mise à la retraite.

S’il y a un doute sur l’imputabilité il peut être placé en congé maladie (dit CMO Congé Maladie Ordinaire) jusqu’à ce que soit confirmée l’origine professionnelle de l’affection, dans cette affirmative le congé maladie sera transformé en congé imputable au service.

3 – L’EMPLOYEUR

Doit déclarer l’AT (imprimé S 6200f) auprès de la caisse de SS. Le salarié peut le faire lui-même en cas de résistance de l’employeur et s’assurer de la réalité des faits par une enquête administrative et fournir le rapport hiérarchique, il relate les circonstances dans lesquelles l’agent a contracté la maladie professionnelle.

4 – Le rôle de la Commission De Réforme (CDR)  – Article 57-2 de la loi du 26 Janvier 1984

Les commissions de réforme sont des instances consultatives (médecins et représentants de l’administration et des agents), elles formulent un avis sur l’imputabilité de l’accident ou de la maladie au service et sur la radiation des cadres du fait de l’invalidité, ainsi que l’octroi de l’ATI (dispose d’un ou deux mois pour statuer).

L’avis de la CDR ne lie pas l’administration.

Article 16 de l’arrêté du 04 Août 2004 la commission de réforme doit entendre l’agent.

L’avis de la commission de réforme n’est pas créateur de droit et ne peut faire l’objet d’un recours contentieux. Cependant l’agent peut le contesteren sollicitant un nouvel examen ou en relevant appel.

La consultation de la commission de réforme est obligatoire pour la fonction publique hospitalière quelle que soit la durée de l’arrêt de travail alors que pour les agents de la fonction publique territoriale après 15 jours d’arrêt de travail.

5 – La décision

Généralement sous forme d’arrêté pris par l’exécutif local, elle suit le régime des actes unilatéraux créateur de droit et donc contestable devant le TA, suivant la jurisprudence TERNON du 26 octobre 2001 cette décision ne peut être retirée que pour un motif d’illégalité dans un délai de quatre mois à compter de sa signature.

En application de la loi du 11 Juillet 1979 cette décision doit être motivée (énoncé des considérants de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision). Il s’agit du contentieux de l’excès de pouvoir et le contrêle est dit normal.

Attention à penser à demander au juge qui doit annuler la décision d’enjoindre à l’administration de prendre une nouvelle décision (911 du CJA au titre des mesures d’exécution).

Le juge des référés peut suspendre une décision de refus de reconnaître l’imputabilité au service d’un accident ou d’une maladie dès lors que l’urgence le justifie et qu’il est fait état de moyens propres à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision.

II – Conséquences de cette reconnaissance

Les congés maladies ne peuvent bénéficier à l’agent qu’en vertu d’une décision, laquelle intervient à l’issue de la procédure que l’on vient d’examiner.

A – Situations possibles

– CMO : Congé maladie ordinaire :  maladie nécessitant un arrêt de travail, d’une durée maximale d’un an (trois mois à plein traitement et neuf mois à demi traitement).

Ensuite reprise après avis du Comité Médical Départemental : en cas d’inaptitude : reclassement à un autre poste, mise en disponibilité si inaptitude non définitive ou mise en retraite anticipée en cas inaptitude définitive ou totale après avis de la Commission Départementale de Réforme.
– CLM : Congé Longue Maladie : maladie nécessitant un traitement prolongé et

présentant un caractère invalidant. L’agent en fait la demande auprès de l’autorité territoriale. Il faut que la maldie fassse partie de la liste figurant à l’arrêté du 14 Mars 1986 (sinon il faudra reccueillir l’avis du Comité Médical Supérieur). La durée est de trois ans (un an plein traitement et deux ans à demi traitement). Accordé par tranche de 3 à 6 mois.

– CLD : Congé Longue Durée : cinq groupes de maladies ouvrent droit à un tel congé : la tuberculose, les maladies mentales, la maladies cancéreuses, la poliomyélite, les déficits immunitaires graves et acquis. Pour en bénéficier il faut avoir épuiser la rémunération à temps plein du CLM. Pour une durée de cinq ans, l’agent perçoit son plein traitement (hors primes) durant trois ans et demi traitement pour les deux dernières années.

Après un CLM ou CLD l’agent ne peut reprendre ses fonctions qu’après examen par un spécialiste agrée et un avis favorable du Comité Médical Départemental
– Mise en disponibilité d’office pour raison de santé : n’est accordée qu’après épuisement CMO, CLM, CLD après avis du Comité Médical Départemental ou Commission Départementale de Réforme sur l’inaptitude, d’une durée maximum d’un an renouvelable deux fois.

A l’issue l’agent sera soit réintégré, soit mis à la retraite d’office s’il est inapte, soit licencié pour les agents non titulaires ou les titulaires à moins de 17h30/mois.

B- Versement de l’ATIACL

La reconnaissance de l’accident de servie et de la maladie professionnelle ouvre des droits aux agents victimes :

–        arrêt de travail aussi longtemps que l’état de santé le requiert

–        maintient du traitement par l’administration

–        obligation de réintégration ou de reclassement

–        informations sur la procédure

La reconnaissance de la maladie professionnelle ouvre droit à une indemnisation au titre de l’ATIACL (Allocation Temporaire Invalidité Agents des Collectivités Locales) Versement d’une indemnité temporaire totale (sauf pour les maladies contractées en service.

C – Mise à la retraite pour invalidité en cas inaptitude

Toutefois après un an de congé en continu dans le cas de pathologies imputables au service et si l’inaptitude définitive et absolue de l’agent à l’exercice de ses fonctions est démontrée et qu’il n’est pas possible de le reclasser, la collectivité peut initier une procédure de mise à la retraite pour invalidité.

Une mesure aussi radicale n’est en fait justifiée que lorsque la CDR a validé un taux d’invalidité d’au moins 60%.

Par la suite il va donc y avoir une procédure de consolidation.

Les fonctionnaires ont droit à une réparation de leurs séquelles invalidantes. Le régime d’indemnisation est différent de celui du droit commun.

III Réparation de l’invalidité

A – Réparation forfaitaire

La réparation est forfaitaire et calculée en tenant compte uniquement du taux d’incapacité = ATI Allocation Temporaire Invalidité, son traitement n’est donc pas pris en compte.

Cette indemnisation n’inclue en principe aucun élément de personnalisation. Les prestations d’invalidité ne couvrent que la réparation du préjudice corporel et du préjudice fonctionnel d’agrément. Les dommages économiques ne sont pas couverts entièrement et les dommages extrapatrimoniaux ne sont pas pris en considération.

Le contentieux relève de la juridiction administrative et du plein contentieux.

B – Réparation complémentaire sans faute

Pour autant le CE a admis l’élargissement de l’indemnisation. sans faute de l’employeur public  et considéré dans sa décision du 04 Juillet 2003 qu’une indemnisation complémentaire réparant les souffrances physiques et morales pouvait être obtenue même sans faute.

La réparation intégrale sans faute a été développée pour les dommages résultant d’accidents de la circulation, de transfusions sanguines, d’exposition à l’amiante et d’accident médicaux.

C- Réparation complémentaire pour faute

De même la notion de faute inexcusable(Faute lourde en terminologie administrative) n’est pas étrangère au droit de la fonction publique, c’est au travers de la responsabilité de l’état soit en tant qu’employeur, soit en tant que puissance publique que s’ouvre depuis quelques années la possibilité d’une indemnisation intégrale des AT-MP des agents publics.

La responsabilité de l’état se rapproche de la notion développée par la Cour de Cassation liée à l’obligation de résultat de l’employeur. Le non respect par l’employeur des obligations de sécurité par l’administration a été caractérisée de faute lourde, ou de carances fautives (CE 3/03/2004 ministre de l’emploi et de la solidarité/consorts Boudignon/Botella/Thomas/Xuereff).

Avec la règle du forfait coexistent des procédures permettant l’accès à une plus large indemnisation.

D – La rente

Lorsque le fonctionnaire est radié des cadres il perçoit en sus une RI ou RVI (Rente (Viagère) Invalidité) calculée en fonction du dernier traitement versé par la CNRACL (Caisse Nationale de Retraite des Agents des Collectivités Locales).

La réparation n’intervient que pour un taux supérieur à 10% et n’est plus révisable une fois qu’il est fixé (Décrêt 2000-1020 17/10/2000).

Le taux d’invalidité est déterminé en fonction d’un barême indicatif d’invalidité prévu par le code des pensions civiles et militaires de retraite (Art L28 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; Art 37-IV du décrêt du 26 Décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales.).

IV Le droit à reclassement de l’agent

Le conseil d’état a crée un nouveau PGD le 02 Octobre 2002 (chambre de commerce et d’industrie de Meurthe et Moselle c/ Fardouet) : le fonctionnaire physiquement inapte définitif à tout emploi bénéficie d’un droit à reclassement

L’administration doit après avis du CMD inviter le fonctionnaire qui a été déclaré inapte à l’exercice de ses fonctions et dont le poste n’est pas adaptable à présenter une demande de reclassement dans un emploi d’un autre corps.

Dès lors qu’il formule une telle demande et qu’il précise le corps dans lequel le reclassement est souhaité l’administration ne peut à l’expiration de ses droits statutaires à congés maladie le mettre en disponibilité d’office que si ce reclassement est impossible dans l’immédiat.

L’employeur doit apporter la preuve qu’il a étudié l’adaptation du poste occupé (CAA NANCY Syndicat intercommunal scolaire du Vernois 23/03/06).

Le CNFPT et le CDG (gérant la bourse des emplois devenus vacants) interviennent pour le reclassement des fonctionnaires de catégories A, B, C momentanément privés d’emploi.

Un agent apte à retravailler sur un autre poste bénéficie du droit à être maintenu en CMO avec plein traitement dès lors qu’aucune offre de poste ne lui a été faite.

 

– Avant tout la mise en disponibilité d’office

La mise en disponibilité d’office ne peut être décidée que si une tentative de reclassement a été effective et réelle et si la collectivité concernée ne dispose d’aucun poste adapté.

En cas de recours contre cette mise en disponibilité la collectivité doit justifier qu’elle a entrepris toutes les diligences pour tenter de reclasser l’agent. Elle commettrait une erreur de droit si elle le plaçait en disponibilité sans avoir examiné les possibilités de reclassement et sans l’avoir invité à présenter une telle demande.

Dans l’attente du reclassement si le CMD ne prolonge pas la disponibilité l’administration employeur doit le placer dans une position statutaire régulière, le fonctionnaire est maintenu en surnombre pendant un an dans sa collectivité.

Pendant cette période tout emploi crée ou vacant correspondant à son grade dans la collectivité doit lui être proposé en priorité.

 

– Ensuite le licenciement

Le licenciement est envisagé par le conseil d’état (chambre de commerce et industrie de Meurthe et Moselle/Fardouet 2/10/02) comme la seule solution après que l’employeur ait recherché en vain à reclasser l’agent concerné dans un autre emploi.

Le licenciement entraine la radiation des cadres et donc la qualité de fonctionnaire. Jugé que l’autorité qui prononce la radiation prononce donc le licenciement (CAA BORDEAUX 14/02/2005).

Si l’employeur ne peut pas prouver qu’il a fait diligence pour trouver un poste, la décision subséquente encours l’annulation.

L’annulation emporte obligation pour l’administration de réintégrer le fonctionnaire dans l’emploi qu’il occupait. Il condamne à verser à l’agent une indemnité représentative de la totalité des rémunérations qu’il aurait perçues durant la durée de l’éviction, nonobstant la réparation du préjudice moral. Cette annulation produit comme autre effet la nouvelle saisine de l’administration d’une demande de reclassement présentée par l’agent.

Dans la mesure où l’agent refuse le poste de reclassement qui lui est proposé le licenciement est justifié.